L’Okavango au galop – Bostwana

L’Okavango est un perdant magnifique. Après une naissance furtive entre deux rochers des hauts plateaux angolais, il dégringole vers l’ouest attiré par la gravité et le bon sens vers l’Atlantique tout proche, et puis se ravise, se prend à rêver d’un destin de grand fleuve, tente sa chance vers le sud avant d’aller se fourvoyer dans les plaines desséchées du Kalahari. Quand il réalise son erreur, il est trop tard. On n’a jamais vu l’eau remonter les pentes, aussi faibles soient-elles. Il ne lui reste plus qu’à mourir à petites gouttes, en un labyrinthe de chenaux engorgés de papyrus, une mosaïque d’îles boursouflées de termitières et de lagunes fleuries de nénuphars. Une sublime évaporation. Une agonie grandiose. Les vagues successives des troupeaux arrosent cette oasis improbable comme le flot d’une marée vivante. Une eau couleur de thé coule en silence sur le lit de sable blanc. Les gerris, ces insectes aux longues pattes, champions de patinage, font leur gymnastique entre les carex et les joncs. Sur la rive, une aigrette mouille ses pattes dorées avec des minauderies de comtesse en visite à la campagne. Tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté. Il est temps d’y mettre un peu d’ambiance. Le signal du galop est à peine donné que le staccato des sabots martelant la surface remplit tout l’espace. Les chevaux trempés, luisants, entourés de gerbes étincelantes, les muscles tendus dans l’effort, les yeux à fleur de tête, scrutant les chausse-trappes de l’eau qui dort, semblent sortir d’un tableau de Géricault. (…) Lire la suite A/R 34

Photographe : Christophe Migeon
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Écrit par
Christophe Migeon
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