Gap n’est pas qu’une marque de vêtements

Je t’écris de Gap, Hautes-Alpes, qui est de toute évidence le plus bel endroit du monde. Je t’accorde que ce propos n’a aucune valeur scientifique. Mais c’est le cri du cœur (et le cœur vaut-il moins que la raison ? Vous avez 4 heures), le cri du cœur d’un homme qui a baroudé sur les cinq continents, navigué sur les sept mers et vécu treize ans à Paris. Après vous avoir écrit de Nicosie, du Qatar ou du Cap Horn, je reviens sur mes terres natales, heureux qui comme Du Bellay préfère au bout du compte son petit Liré au mont Palatin.

 

Les Alpes et la Provence

Tu me diras, ça marche avec n’importe quel patelin, on est toujours un peu attaché à ses origines, qu’elles se trouvent à Dunkerque ou à Bamako. Mais tu dis ça parce que tu n’es jamais venu dans cette région où la majesté des Alpes épouse le miracle de la Provence dans un écrin de lumière. Chez moi, on contemple les montagnes enneigées d’un œil, et on entend les cigales de l’autre. Écoute, visiteur, le chant de la Durance dévalant ces contrées qui virent, il y a 22 siècles, passer les éléphants d’Hannibal ? Regarde les marmottes et les bouquetins qui broutent tranquillou sur ces pentes où, l’hiver venu, les skieurs viendront faire les kékés ? Plonge dans l’émeraude obscure du lac de Serre-Ponçon, cet idéal aquatique parsemé de criques édéniques et préservées des hordes.

 

Sous le soleil, la gloire

Joli bassin gapençais, mon petit Valhalla enclavé. Nous sommes loin de tout, ce qui veut dire loin des industries polluantes et des autoroutes. L’air y est pur et le temps clément. On raconte cette histoire du retraité de Météo France ayant choisi de s’installer ici après toute une carrière à observer les cieux de notre pays. 300 jours de soleil par an, on n’en est pas peu fiers. Gap, c’est « la capitale douce », clame l’office du tourisme de la plus haute préfecture de France (oui, parfaitement). Bien vu pour la douceur ; pour la capitale, c’est un peu du foutage de gueule avec 40 000 habitants. On ne peut pas tout avoir. Pour être honnête, je ne garantis pas que tu trouveras un restaurant ouvert après 21 h en hiver. Je ne te mentirais pas en te faisant croire que cette ville est un haut lieu de shopping (aucun magasin Gap à Gap) ou de culture. Certes, aucune autre cité ne peut s’enorgueillir d’être la patrie de Guillaume Farel (1489-1565). Comment ? Tu ne connais pas Guillaume Farel, pote de Calvin et artisan de la Réforme en Suisse romande, qui a une jolie plaque commémorative sur la place Jean-Marcellin ? Comment ? Tu ne connais pas Jean Marcellin (1821-1884), le sculpteur de la fameuse statue du baron Ladoucette (1772-1848) ? Comment ? Tu ne connais pas… D’accord, j’arrête. Gap n’a pas produit de grands personnages historiques, mais elle engendre des pelletées de champions : des alpinistes, des parachutistes, des footballeurs, des champions du monde de rallye (et même une détentrice du record de France de lancer de poids). Des sportifs, nourris au grand air sain de notre nature privilégiée. (…) Lire la suite AR34

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Écrit par
Julien Blanc-Gras

Né en 1976, Julien Blanc-Gras est un écrivain et journaliste-reporter.
Après des études de journalisme à Grenoble, il obtient un DEUG d’histoire puis une maîtrise en journalisme, puis à Hull en Angleterre.

En 2005, il publie au Diable vauvert, « Gringoland », qui conte un périple latino-américain et sera ensuite lauréat du festival du Premier Roman de Chambéry et « Talents à découvrir » des librairies Cultura.

En 2008, il publie « Comment devenir un dieu vivant », une comédie apocalyptique déjantée, puis « Touriste » en 2011, et « Géorama » en 2014.

Il a également séjourné aux îles Kiribati à l’automne 2011 pour réaliser son livre, « Paradis (avant liquidation) » (2013).

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