Matthieu Ricard, le moine photographe

Matthieu Ricard ne peut jamais demeurer loin de l’Himalaya très longtemps. Il va par les forêts, il va par les montagnes, il va par les monastères. Si le moine marche les yeux fixés sur ses pensées, méditation oblige, le photographe reste à l’affût des instants magiques. Quelques-uns trouvent leur place dans son dernier livre Visages de paix, terres de sérénité. Om shanti om !

Le Tibet est-il votre terrain de chasse à la photo favori ?

Au Tibet, il y a toujours des scènes extraordinaires. Certes en présence d’un grand maître, on n’a pas forcément envie de sortir l’appareil, on préférerait profiter du moment présent, mais en même temps c’est faire un cadeau immense à toutes les personnes qui ne vivent pas dans son intimité. À l’époque, tous me disaient « Oh là là, tu es encore à prendre des photos » et maintenant ils me demandent des photos de ces maîtres disparus. Et puis,  il y a des moments où, on a conduit toute la journée, on a passé un col en voiture à 5 000 mètres, la nuit tombe ; on est fatigués, je n’ai qu’une envie, passer le col avant qu’on soit dans le noir, puis je dis « Arrêtez ! », car j’ai vu un éclairage fantastique avec des rochers roses, une montagne derrière. « Oh ! mais t’as déjà fait cette photo mille fois ! » Je réponds : « Donnez-moi quatre minutes et surtout ne dites rien pendant quatre minutes. »

Vous baladez-vous toujours avec votre appareil-photo ?

Je le quitte parfois totalement, mais il y a des endroits où il n’est jamais très loin, dans mon ermitage par exemple où j’ai conçu un livre de photos qui s’appelle Un voyage immobile. Je photographiais une fois tous les huit ou dix jours, parce que ça ne sert à rien de photographier n’importe quoi, il faut qu’il y ait un moment magique ; et, ce moment magique, il dure quoi, trois minutes ? Je suis donc resté assis un an sur mon derrière pour attendre la lumière, mais je n’attendais rien parce que j’étais simplement là. Ainsi au bout d’un an, j’ai eu quatre-vingts images qui sont quatre-vingts moments magiques.

À quoi ressemble votre ermitage au Népal ?

Il fait 2,80 mètres sur 3. Il y a une baie vitrée qui fait à peu près toute la taille du mur, ce qui fait que je sais exactement ce qui se passe dehors dans le paysage. Le soir, quand j’éteins la lumière, j’ai l’impression d’être dans un vaisseau spatial parce que je vois toutes les constellations.

Combien de temps pouvez-vous y rester ?

J’ai passé environ cinq ans en retraite solitaire dans différents ermitages. Ce n’est pas assez, mais enfin c’est un bon début. Durant ces retraites, je pratique la méditation environ 8 heures par jour.

Anecdote avec Henri Cartier-Bresson:

La méditation bienveillante:

Premier voyage seul:

Photographe : Thomas Chéné
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Écrit par
Michel Fonovich
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