La quinceañera : 15 ans, l'âge de féminité en Amérique latine

La quinceañera : 15 ans, l’âge de féminité en Amérique latine

La quinceañera et le changement de statut

Généralement, il n’y a pas forcément un moment précis où une jeune fille devient une femme. Est-ce les premières règles ? La première relation sexuelle ? Le mariage ?… Cependant, en Amérique latine, il y a vraiment une date à partir de laquelle une fille change de statut : c’est lorsqu’elle fête ses quinze ans. On appelle ça la « quinceañera », en espagnol.

La famille et les amis sont alors invités pour une gigantesque fête. Comme un mariage, en somme, avec buffet, danse, et tout le tralala jusqu’à l’aube. Mais il y a tout un rituel très particulier (qui varie, d’ailleurs, selon les régions et les familles). La jeune fille est vêtue d’une ample robe, genre bonbonnière, et rose de préférence. Alejandra, qui est Colombienne et à fêté elle aussi sa  quinceañera, nous apprend que «  ce jour là, la fille a non seulement le droit de se maquiller pour la première fois, mais elle a l’obligation de le faire : c’est comme une caution officielle de se comporter comme une femme ».

Ensuite, pour ouvrir le bal, la jeune fille est invitée par son père à danser une valse, « et c’est souvent Le beau Danube bleu ». Il arrive que le père enfile symboliquement des chaussures à talons hauts à sa fille, éminent symbole de féminité. Et il lui chante ensuite une sérénade. «En Colombie on chante souvent une chanson classique : « Mi niña bonita », ce qui veut dire ma belle petite, où il vante la féminité de sa fille » poursuit Alejandra. Un père qui fait l’éloge des charmes de sa progéniture, n’y a-t-il pas là quelque chose de subtilement incestueux ? Nul doute, pour Alejandra : «et c’était même assez gênant, je me sentais un peu perturbée  ». La fille poursuit la fête en dansant avec précisément quinze hommes ou garçons. Il arrive même qu’elle donne symboliquement l’une de ses poupées à une fille plus jeune, façon de dire « je n’en ai plus besoin maintenant que je suis grande ».

Une coutume ringarde et kitch ?

Toutefois, certaines adolescentes jugent que la quinceañera est une coutume ringarde et kitch. Alejandra était de celles-là : « Je ne voulais pas faire la fête des quinze ans, car j’étais déjà rebelle, mais mes parents ont insisté car c’est une question sociale vis à vis de la famille et des amis. Alors, j’ai trouvé un compromis, en prenant une robe bleue foncée et sans dentelles ».

Quant à la sexualité proprement dite, c’est une autre affaire. D’avoir passé le cap des quinze ans ne signifie pas qu’il est permis de découcher ou de ramener des garçons à la maison  : « la sexualité reste tabou, même après la quinceañera, on n’en parle pas ». Bref, le passage symbolique de l’adolescence au statut de femme est une chose, la mise en pratique en est une autre. Et ceci, en Amérique latine comme partout ailleurs.

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Écrit par
Antonio Fischetti
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